Pour donner l'impression à la population qu'ils ont encore un pouvoir et donc que les élections ont encore un sens, les gouvernements font de la gesticulation sur les terrains qui leur restent. Tout l'art de gouverner consiste désormais à imaginer des mesures qui ont une visibilité dans la vie quotidienne des gens, mais qui ne sont pas contradictoires avec les intérêts des multinationales.
Exemples récents de ce type de mesures: la parité homme-femme, le PACS, le quinquennat (élire un président qui n'a plus de pouvoir pour 7 ans ou pour 5 ans, quelle importance!).
Le dernier thème choisi par la gesticulation gouvernementale est la sécurité routière.
Le gouvernement reste également silencieux sur une autre cause majeure d'accident: la consommation massive de tranquillisants et de somnifères (la France est au premier rang mondial pour la consommation par habitant de ces produits).
Lorsque Nicolas Sarkozy déplore les morts sur la route, on ne pourra s'empêcher d'y voir des "larmes de crocodile" tant qu'il ne s'attaquera pas avec équité aux causes du problème, et tant que le gouvernement ne montrera pas une compassion équivalente pour les morts beaucoup plus nombreux dus aux maladies ou aux suicides causés par la misère et le chômage, ainsi que pour les morts causés par la pollution (9500 morts par an en France à cause des particules cancérigènes émises par les moteurs diesels, ou encore 16.000 morts en France pendant l'été 2003 à cause de la canicule causée par le CO2 lâché dans l'atmosphère), sans parler des morts causés par les poisons chimiques et les pesticides contenus dans l'alimentation et dans l'eau. Le gouvernement ne se préoccupe pas non plus des centaines de milliers de victimes de l'industrie médicale et pharmaceutique (à cause des effets secondaires des médicaments, de la sur-médication, ou des maladies nosocomiales attrapées par 7% à 12% des personnes soignées à l'hôpital, et 22% des personnes soignées dans les services de réanimation selon les chiffres officiels. Les infections nosocomiales causent 35.000 décès en France chaque année en France; elles sont la quatrième cause de mortalité en France, loin devant les accidents de la route).
Mais avec l'arrivée de Nicolas Sarkozy au ministère de l'Intérieur, une répression policière hystérique et maniaque s'est abattue sur les automobilistes, et sur les citoyens ordinaires en général.
Encore plus fou: récemment, un automobiliste a été verbalisé parce qu'il mangeait un gâteau tout en conduisant. Sur le PV, le fonctionnaire de police a formulé l'infraction ainsi: "Conducteur d'un véhicule en mouvement ne se tenant pas constamment en état et en position d'exécuter commodément et sans délai toutes les manoeuvres qui lui incombent, par l'utilisation à la main droite d'une viennoiserie. Art. R412-6-1CR".
Alors que les hôpitaux et le système éducatif sombrent dans un délabrement total, des moyens démesurés sont mobilisés pour traquer l'automobiliste: patrouilles banalisées qui se fondent dans la circulation pour surprendre les conducteurs qui n'ont pas mis leur ceinture ou qui utilisent leur téléphone portable, jumelles avec visée radar pour contrôler simultanément les excès de vitesse et le port de la ceinture, surveillance du trafic par hélicoptère, radars automatiques, etc.
Pendant ce temps, les véritables problèmes de sécurité ne sont toujours pas résolus: racket dans les écoles, incendies de voitures, agressions, viols collectifs dans les caves des cités, cambriolages, etc. Car cette répression vise les citoyens ordinaires, et non les délinquants qui sont utiles au gouvernement pour justifier la réduction des libertés et pour maintenir la population dans le stress et la peur.
La vie de tout citoyen peut désormais être brisée pour une simple infraction routière.
Par ailleurs, les radars automatiques et leur système informatisé pour l'envoi des PV ont démontré leur manque total de fiabilité. De nombreux automobilistes reçoivent des amendes pour des excès de vitesse qu'ils n'ont pas commis, sur des routes qu'ils n'ont jamais emprunté. Des retraités qui n'avaient pas bougé de chez eux, ou encore un agriculteur avec son tracteur ont reçu des amendes pour excès de vitesse (le tracteur avait été mesuré à 120 km/h). Au mépris des principes élémentaires de justice dans une démocratie, les amendes des radars automatiques sont générées par un processus entièrement automatisé. De la constatation de l'infraction jusqu'à l'envoi du PV, tout est fait par des machines, sans intervention humaine et sans contrôle. Même en cas d'erreur, l'amende (souvent équivalente à un mois de salaire) doit être payée immédiatement et sans possibilité de contester l'infraction. En cas de refus de paiement, le contrevenant risque une suspension de son permis de conduire.
Le résultat est que chaque conducteur vit désormais dans la peur, même lorsqu'il respecte le code de la route. Et cette peur fait peut-être aussi partie des objectifs visés par cette répression policière: créer un climat d'oppression et de soumission, pour diminuer la probabilité d'une réaction de la population contre la véritable guerre sociale menée par le gouvernement Raffarin sur le terrain économique.
Les mesures concernant la sécurité routière ne s'appliquent pas au "monde d'en-haut". Si les ministres devaient subir eux-mêmes les contraintes qu'ils nous imposent, ils ne les auraient pas décidées. Pour eux, il est hors de question de se traîner à 90 km/h et d'allonger leurs temps de transport de 50% comme les citoyens ordinaires.
En Novembre 2003, le magazine Auto Plus a utilisé une jumelle-radar pour prendre Nicolas Sarkozy en flagrant délit de "grand excès de vitesse", à 103 Km sur une portion de route limitée à 70, alors que le ministre se rendait à l'inauguration d'un radar automatique. Au retour, Nicolas Sarkozy a été à nouveau flashé à 99 km/h sur la même route limitée à 70. Pour le citoyen ordinaire, un dépassement de plus de 30 km/h entraîne au minimum la suspension du permis et une amende de 760 euros.
Quelques jours plus tard, les gendarmes ont intercepté une voiture du ministère de l'Intérieur qui roulait à 209 km/h sur l'autoroute, au lieu de 130. Les occupants de la voiture étaient 3 policiers du Service de protection des hautes personnalités (SPHP) qui retournaient vers Paris après être partis de Nantes, où ils avaient participé avec leur ministre aux "Assises des libertés locales".
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