stratégiesplanétaires


ETATS-UNIS
Main basse sur l'Amérique
La contestation s'amplifie, y compris aux Etats-Unis. Un an après le choc du 11 Septembre, les intellectuels américains se réveillent. La stratégie de la peur utilisée par George Bush ne parvient plus à détourner l'attention de la façon dont une caste est en train d'accaparer toutes les richesses, créant un décallage dangeureux pour la démocratie entre une super-élite et le reste de la population.

Dans son numéro du 9 Janvier 2003, Courrier International publie à la Une un dossier édifiant...

 

L'éditorial de Courrier International
par Philippe Thureau-Dangin - 9 Janvier 2003

 
Imaginez un pays où le futur candidat à la présidence aurait été choisi par de riches magnats du pétrole; où d'autres industriels de la finance, du tabac ou de la pharmacie auraient financé sa campagne électorale et sa victoire à l'arraché. Imaginez maintenant que, dans ce même pays, les 100 plus importants PDG gagnent 1000 fois plus que leurs salariés "ordinaires"; où une infime partie des habitants - disons 0,1 % de la population - verrait ses revenus croître à une vitesse jamais vue depuis soixante-dix ans; où le président en question, pour combattre la crise économique, ne trouverait rien de mieux que des allégements fiscaux profitant à ces mêmes privilégiés...

Imaginez aussi que ce pays soit la première puissance militaire et économique du monde et qu'il veuille régenter la planète. Imaginez que ce président et ses mandants souhaitent imposer, de gré ou plutôt de force, un nouvel ordre pétrolier, où rien ne viendrait plus les contrecarrer... Tout cela n'est pas de la fiction. Les Etats-Unis mènent aujourd'hui une politique intérieure et étrangère dictée par les intérêts d'une petite élite de plus en plus héréditaire. (...)

Qu'il s'agisse de tiers-monde, d'environnement, de commerce, de géopolitique en Irak ou au Venezuela, toutes les décisions de Washington sont marquées du même sceau: un mépris affiché pour le bien commun. Certes, on le sait depuis Bernard de Mandeville et sa Fable des abeilles, écrite en 1714, les vices privés et les dépenses somptuaires des très fortunés peuvent apporter la "félicité" ou du moins du travail au grand nombre. Paul Krugman [professeur d'économie à l'université de Princeton] a donc évidemment raison d'évoquer l'Ancien Régime pour le retour au premier plan de cette élite cynique. Mais voulons-nous vraiment d'une pareille ruche, où, comme le dit Mandeville, règnent "la fraude, le luxe et la vanité"?

Philippe Thureau-Dangin

 

 

L'éditorial de Paul Krugman dans le New York Times Magazine